Lunar Caustic

    Représentations

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Le projet

Lunar Caustic sera de la famille des créations nées d’improvisations, comme Savent-ils souffrir ?, Chaux Vive, Silures, Jachère… écritures de plateaux qui ont jalonné le parcours de la compagnie.

Qui dit improvisation dit règles du jeu, contraintes. Nous avions imaginé un protocole pour Jachère (2016) : donner à chaque comédie.ne.s un terreau littéraire de départ, selon ce que je percevais d’elles, d’eux, de leur énergie. Ça allait de Dante à Ginsberg en passant par Emmanuelle Bove, Henri Michaux, des écrits d’art brut, etc. Sur les six interprètes, trois ont vraiment joué le jeu, trois autres, plus jeunes, moins conscients de l’importance du processus, l’ont fait plus mollement, ou pas du tout. De mon côté je l’expérimentais, et je ne l’ai peut-être pas assez valorisé. Bref, le jeu était pipé d’avance, et ce fut une demi-tentative. Mais malgré cela, nous avons pu entrevoir ce que cela aurait pu donner.

Improviser à partir d’un lexique précis, de constructions de phrase, de motifs récurrents, donnait tout de suite de l’épaisseur, de la densité à l’expérience.

Nous aimerions reprendre ce processus sur Lunar Caustic, en étant encore plus clair sur le travail de décryptage et de préparation que cela demande en amont pour arriver imprégnés d’un terreau. Je n’ai pas encore toutes les sources, j’attends de parfaire la distribution. Je pense à Dante toujours (l’actrice Laurence Mayor travaille dessus depuis des années), Strindberg (Inferno), Malcolm Lowry (Lunar Caustic). Sylvie Germain (Hors champ), Marta Hillers (Une femme à Berlin). Et d’autres qui s’agrègent sans cesse. Il faudra plus trad définir un corpus précis.

Chaque personnage porte une part d’un monde fragmenté, comme un miroir brisé. Des non-dits, des ellipses, des motifs obsessionnels, qui se composent avec les fragments des autres.

Un lieu poreux - espace et vidéo

Espace

Un lieu non-explicite, entre l’hôtel, le centre de cure, l’hôpital. Des ouvertures, des transparences, pour pouvoir faire sentir des présences-absences.  Aucun n’est jamais seul, mais entouré de fantômes, de présences. Il n’y a pas de nuit, de sommeil réparateur, le baume du souci, mais des veilleurs, des veilleuses.

Vidéo

Outre la lumière et le son qui accompagneront la structure musicale des séquences, et créeront des ouvertures, des resserrements, des chemins d’écoute, le travail du vidéaste sera un élément essentiel. Un travail de motifs et de scènes qui reviennent, comme souvent dans les films de Tarkovski. Comme des images hypnagogiques, en contrepoint, qui iront de séquences assez longues, à des petites respirations, des virgules, un visage qui disparait sitôt apparu.

Pas un travail d’explicitation, ni de séquences prises en direct au plateau, mais comme un autre monde, un inconscient qui revient. Je pense à des mondes lointains et recomposés comme dans Le miroir de Tarkowski, ou La couleur de la grenade de Sergueï Paradjanov. Je pense aussi au roman de László Krasznahorkai, Guerre & Guerre, qui se déploie sur deux périodes parallèles, et comme concomitantes, l’ère moderne et l’antiquité. Comment le rythme donné par la vidéo est un contrepoint au plateau, comme si leur vie était poreuse à d’autres réalités, par résonance sympathique.

 

 

Se tenir au bord

Ce qui nous intéresse, ce n’est pas de traiter de l’alcoolisme ou de la maladie psychiatrique. Ce n’est pas non plus ce qui intéresse Lowry d’ailleurs.

Ce sont les miroirs qu’ils et elles nous offrent, et cette manière de se tenir à la marge, au bord.

Au bord ne veut pas dire éloignés du monde, à part du monde, mais au contraire le regard et la sensibilité plongés dans ce monde. Privés (ou débarrassés) des petits objectifs, des rituels communs (travail, charge familiale, représentation sociale), ils ont en eux la place et le temps pour être envahis, peuplés, habités par des mythes, des phrases éparses, des mélodies qui traînent dans l’air.

Deux femmes, trois hommes, de 25 à 75 ans. 5 îlots de solitude qui se projettent les uns contre les autres les uns avec les autres, et forment une fresque mouvante.

L'épissure des voix

Il y aura un travail musical sur l’entrecroisement des voix, des brouhahas variés et organisés, qu’on écrira comme on écrit une partition de musique contemporaine.

Je viens de la musique, c’était mon premier métier, et la langue (ou les langues) sont pour moi des vecteurs de sens mais aussi de sensations d’ordre musical. Mes premières rêveries tournent autour de la structure musicale d’abord, au sens où les voix parlées forment aussi de la musique.

Ils, elles, ont des mondes fragmentés, traversés de lignes fortes – leitmotivs, obsessions, visions, récits – comme tout un chacun, mais eux y sont plongés plus profondément, étant plus poreux à leurs pensées transversales, leurs imaginations, leurs peurs, leur besoin de consolation. C’est en cela qu’ils sont des concentrés d’humanités.

J’aime les dialogues qui ne se répondent pas, comme sait les écrire Sara Stridsberg, ou Debbie Tucker Green. Des dialogues qui se répondent son à son plutôt que de sens à sens, des dialogues qui finissent par laisser passer des appels secrets, des cris de bêtes, miaulements, hululements. C’est cette voie-là que nous creuseront à partir des improvisations.

Thématiques

Je ne sais pas si l’on peut parler ici de thématique au sens propre du terme. Sur ces écritures de plateau, au contraire des créations où le texte est premier et conduit toute l’équipe dans une recherche déjà balisée, je me méfie d’enfermer la recherche dans des titres ou des mots-clés. Durant le travail, les tentatives et les couches successives, je suis très étonné des directions que cela prend parfois et que je n’avais pas toujours consciemment prévues.

Il s’agit plutôt d’écouter ensemble un lexique qui affleure au fil des répétitions, des sensations communes qu’on a du mal à expliciter, mais que l’on traduit au plateau, tous ensemble, au fil des tentatives. Des premières pistes que l’on avait abandonnées reviennent transformées. Des petits motifs qui courent d’une tentative à l’autre finissent par former un sujet prégnant.

Strindberg, Dante, Lowry, Germain, Hillers. Des écritures très différentes mais qui ont en commun de donner des voix à des êtres hypersensibles, des imaginatifs, des veilleurs, des capteurs de monde. Non pas en raisonnant, en théorisant, mais de manière physique, intime, organique.

Au milieu du chemin de notre vie je me retrouvai par une forêt obscure car la voie droite était perdue. (Dante)

C’est le terreau de ces auteurs, de ce qu’ils nous soufflent ou nous crient, que nous chercherons à creuser, non pas en élaborant un montage d’extraits, mais en les prenant comme sources de nos improvisations et de nos écritures. Il est possible que des fragments de textes restent tels quels, mais ce ne sera pas le matériau principal.

Lunar Caustic, un poème de plateau

Pas de narration, mais un entrelacs de récits. L’édifice ne tient donc pas sur une dramaturgie classique, mais sur une distribution d’intensités, sur des rythmes, des motifs, et un chemin de sensations qui apparente cette recherche plus au poème qu’au roman ou à la chronique. Mais comme l’écrit Meschonnic, « tout poème est un scandale », c’est-à-dire qu’il cherche à explorer les limites du langage et du récit, qu’il secoue nos attendus.

Dans cette nature de création, c’est-à-chaque fois la même aventure : après une période d’improvisations libres pour laisser apparaître des motifs, des structures possibles, il y a une phase d’écriture collective pour chercher une sorte d’évidence, de simplicité, le but n’étant pas de créer un objet obscur et difficile, mais ouvert, sensible, qui se déploie avec simplicité.

Pistes de scènes

Je sais qu’il y aura une vieille femme (Laurence Mayor) qui baragouinera le monde de Dante. Durant les répétitions de Jachère, j’ai vu improviser Laurence à partir des chants de L’enfer, moitié en français, moitié en italien. Et c’est étonnant et magnifique. Nous n’avons rien gardé de cela car la structure de Jachère ne le permettait pas. Mais parfois les séquences coupées lors d’une création sont réinjectées dans une autre (La Divine Comédie / Dante, Une femme à Berlin, Marta Hillers)

Je sais qu’il y aura un petit bonhomme, sorti de Lowry, le Garry de Lunar Caustic, qui racontera des histoires. Tout devient histoire, même ce qu’il voit, même ses camarades, il les met dans des histoires, leur invente un destin. On tente parfois de le faire taire, mais cela repart. C’est sa manière de respirer, de tenir debout.

Je sais qu’il y aura un homme hyper-sensible aux courants et aux énergies qu’il croit sentir dans l’air, aux vents de violence, de guerre qu’il hume dans l’atmosphère, aux malédictions diverses qu’ils tentent d’éviter, de conjurer (Inferno de Strindberg).

Je sais qu’il y aura un homme contemplatif, perdu dans ses imaginations, passionné d’astronomie, de botanique, et sans cesse étonné, jusqu’à l’écarquillement de tout son être, par les phénomènes naturels et mystérieux se déroulant autour de lui (Être un chêne / Laurent Tillon, Manières d’être vivant / Morizot).

Je sais qu’il y a une jeune fille qui est entrée dans ce lieu comme Alice entre dans un terrier, qui conduira notre écoute et notre regard en étant dans l’étonnement de ces êtres, qui se croira parfois trop petite, parfois trop grande (Alice au Pays des Merveilles, Lewis Carol, L’enfant-Méduse / Sylvie Germain).

Tout est à contredire, à tenter, je sais sans savoir, bien sûr. Je sais surtout que c’est notre intelligence collective qui fera émerger une forme. Dans ce type de créations, je veille à ne pas décider trop tôt, mais à créer une atmosphère de recherche et de travail, à chercher l’« entre », que ça s’écrivent entre nos corps, nos intuitions, nos tentatives.

Illustration de la création Lunar Caustic

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

<span class="fontBold">En projet</span> - 2025/2026

Une libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Lowry / Conception Jean-Yves Ruf

Lunar Caustic

Création collective

Libre adaptation de Lunar Caustic, roman de Malcolm Lowry. Lowry relate dans ce texte un de ses séjours en hôpital psychiatrique de New York, pour soigner son alcoolisme. Il donnera plusieurs versions de ce texte, qui semble avoir été très important pour lui. Nous tenterons de tisser une libre rêverie à partir du texte de Lowry, suivant le narrateur dans ses hallucinations (il croit parfois se trouver sur un cargo), et tentant de donner chair à la fresque humaine qu'il compose en observant ses camarades d'infortune, des êtres poreux à la violence du monde qui va, reliés aux dimensions invisibles.
  • Scénographie Laure Pichat
  • Costumes Claudia Jenatsch
  • Son Baptiste Mayoraz
  • Vidéo Thomas Guiral
  • Assistanat à la mise en scène Anouk Werro
  • Mise en scène et conception Jean-Yves Ruf
Coproduit par :
Le Maillon Strasbourg (en dialogue)
Maison de la Culture de Bourges (en dialogue)
Le Manège Maubeuge (en dialogue)
  • Laurence Mayor
  • Une jeune femme à distribuer
  • Thierry Gibault
  • Vincent Mourlon
  • Antoine Besson